Santi Romano (1875-1947), auteur de L’ordre juridique (1918), est un des fondateurs de la théorie du pluralisme juridique. Pourtant, cette approche théorique est en rupture avec son héritage historique et idéologique. Une analyse attentive du contexte idéologique et historique dans lequel s’inscrit Santi Romano permet de comprendre comment son approche pluraliste s’inscrit en réalité dans le cadre d’une défense du modèle étatique classique. En dissociant le droit de l’État, Santi Romano espère sauvegarder l’idée d’une suprématie absolue de l’État sur les autres formes d’institutions. Ainsi, si le penseur italien est indubitablement l’un des chefs de file du courant pluraliste, il est, comme l’affirmait Norberto Bobbio, « théoriquement un pluraliste, mais idéologiquement un moniste ». Le texte L’État moderne et sa crise (1909), présenté ici, révèle ainsi le caractère proprement idéologique qui sous-tend l’approche théorique développée par Santi Romano.