L’article part d’une interrogation sur la place du référendum d’initiative présidentielle dans l’économie générale de la Ve République. Mécanisme central d’installation d’une « démocratie plébiscitaire » par de Gaulle, au sens où l’entendait Weber dans ses écrits politiques et propositions pour l’Allemagne au sortir de la guerre, le référendum perd progressivement son utilité et son efficacité à partir de 1962, selon une tendance qui s’accentue encore après 2002 et qui hypothèque aujourd’hui ses perspectives d’avenir. La marginalisation du référendum dans le régime ne suffit pas cependant à remettre en cause la parenté de la Ve République avec la démocratie plébiscitaire webérienne, sur laquelle revient la deuxième partie de l’article. Cette parenté s’est renforcée avec l’élection directe du président et maintenue au regard des principales caractéristiques du modèle (charisme et puissance présidentielle). Si la tendance à un affaiblissement ultérieur du parlement peut être vue comme l’aggravation d’une différence originelle, elle ne trahit pas l’esprit de la démocratie plébiscitaire, qui est la suprématie présidentielle. Pour autant, la domination du chef de l’exécutif sur les acteurs classiques de la démocratie représentative est peut-être en train de se dissoudre dans une certaine impuissance à gouverner, peu conforme à la « démocratie de leadership » qu’imaginait Weber. Ce constat vaut pour de nombreuses démocraties contemporaines, alors que la « présidentialisation » et la relation de plus en plus directe avec l’électorat semblent par ailleurs confirmer la prédiction de Weber d’une convergence vers le modèle de démocratie plébiscitaire.