Les conceptions des rapports entre les droits et libertés et l’État connaissent de profondes variations dans l’espace et dans le temps. Depuis le tournant que représente le XVIIIème siècle, il semble possible d’isoler trois modèles. Le premier peut être nommé « modèle mécanique », le deuxième, « modèle normatif légicentré » et le troisième, « modèle normatif de l’axiologie constitutionnelle ». Le premier modèle peut être associé au temps des « droits de l’homme », le deuxième, celui des « libertés publiques » et le troisième, à celui « des droits fondamentaux ». Ce dernier caractérise ce qu'il est devenu commun d'appeler le néo-constitutionnalisme qui invite à n’envisager l’État que sous la forme d’un État de droit, défini comme une démocratie dotée d’un contrôle de constitutionnalité dont la fonction première est d’assurer le respect des droits et libertés constitutionnels. Au regard des théories qui l’ont précédé, le lieu de la garantie des droits et libertés se trouve ainsi déplacé, d’un point de vue normatif, de la loi à la constitution, et d’un point de vue organique, du législateur vers les juges exerçant un contrôle de constitutionnalité. Reste alors à examiner les conséquences de cette reconfiguration de la fonction de juger au regard des conceptions classiques tant de la séparation des pouvoirs que de la démocratie.