Le plus souvent, les mouvements populistes sont de nature tribunicienne : essentiellement contestataires, ils sont menés par des dirigeants qui, issus de l’opposition, ont vocation à y rester. Mais il arrive aussi, de manière plus exceptionnelle, que ce soit le chef d’Etat lui-même qui prenne la tête de la contestation, et lui confère une puissance exceptionnelle. Il se réclamera alors solennellement de son alliance avec le peuple contre les élites de la classe politique. On en connaît plusieurs exemples récents, tels que Donald Trump ou le candidat Emmanuel Macron. Mais le phénomène a aussi des racines historiques profondes, qu’il convient de restituer, et dans lesquelles le chef d’Etat prend l’exact contrepied du modèle consensuel traditionnel. Ce fut le cas pour des chefs d’Etat aussi divers que Gustave III de Suède, George III d’Angleterre ou Andrew Jackson aux Etats-Unis. La France, quant à elle, a une longue tradition de populisme couronné, depuis Napoléon Ier jusqu’à de Gaulle et Emmanuel Macron. D’une force à peu près irrésistible dans la conquête du pouvoir, le populisme couronné est beaucoup plus fragile lorsqu’il s’agit de l’exercer, car il est contraint d’installer au pouvoir ses propres élites politiques, qui se borneront à succéder aux anciennes. Aussi le chef d’Etat risque de se couper du peuple, et il est rare que l’expérience se solde par un succès.