L’institut Michel Villey a accueilli, le vendredi 13 mai 2011, M. Jeffrey Rosen (Professor of Law at The George Washington University) pour une conférence intitulée :

Three Strands of Conservatism on The U.S. Supreme Court : Lessons for Health Care, Gay Marriage, and Constitutional Review in Europe

La conférence a été introduite par M. Philippe Raynaud, Professeur de philosophie politique de l’Université Paris 2 Panthéon-Assas et membre de l’Institut Universitaire de France.

 

Présentation de Philippe Raynaud:

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Dans cette intervention, le Professeur J. Rosen défend la thèse selon laquelle il est faux de croire qu’il n’existe qu’une sorte de conservatisme aux États-Unis, en particulier du point de vue des idées constitutionnelles. Il distingue pour sa part trois groupes dont les positions sont loin de se recouvrir intégralement : les libertariens, le mouvement du « Tea party » et les conservateurs « pro-exécutif ». Les libertariens sont socialement « libéraux » au sens américain du terme (ils sont par exemple favorables au mariage homosexuel). Les adhérents au mouvement « tea party » sont socialement conservateurs (ils s’opposent notamment à  l’avortement et à  l’extension des droits des homosexuels). Les pro-executive, enfin, sont bien moins défavorables à  l’intervention de l’État fédéral que les deux premiers courants.

Ces différences idéologiques ont un retentissement sur les positions adoptées par ces courants dans le domaine constitutionnel. Les libertariens sont favorables à  l’intervention active des juridictions (« judicial activism ») : ils ne désavouent pas, par exemple, la jurisprudence Roe v. Wade par laquelle la cour suprême constitutionnalise l’avortement sur la base du droit à  la vie privée (privacy). Au contraire, les deux autres courants sont radicalement hostiles au « judicial activism » dont la décision Roe est à  leurs yeux un exemple éminent.

Ces divergences de point de vue trouvent leur reflet dans les positions de certains des juges conservateurs de la Cour suprême. Libertariens et Tea party activists se retrouvent pour dénoncer l’intervention régulatrice de l’État fédéral. Au sein de la Cour suprême, leurs idées trouvent un écho favorable dans les opinions des juges Kennedy et Thomas. Au contraire, les pro-executive sont souvent plus disposés à  admettre une extension des « national powers », et cette position se retrouve dans les opinions du juge Alito. Ces divergences au sein du camp conservateur sont de nature à  affecter la manière dont la Cour Suprême abordera la question de la constitutionnalité de la réforme de la santé voulue par le Président Obama et adoptée par le Congrès. Plus largement encore, les plus radicaux parmi les libertariens vont jusqu’à  contester la validité de tous les mécanismes de régulation économique mis en place au niveau fédéral depuis le New Deal. Si libertariens et Tea party activists partagent une réticence marquée au sujet des pouvoirs de régulation économique de l’État fédéral, ils ne se retrouvent pas toujours sur la manière de revenir à  une situation (à  leurs yeux) plus saine. Ainsi, la stratégie de l’arrêt Lochner consistant à  censurer une législation fédérale sur la base d’un droit à  la liberté contractuelle ne fait pas l’unanimité : comme l’a relevé Robert Bork, ceux qui défendent Roe v. Wade (droit à  la vie privée) sont également tenus d’approuver Lochner (droit à  la liberté contractuelle).

 

Conférence de Jeffrey Rosen:

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Conférence de Jeffrey Rosen

Pour citer cet article :

Jeffrey Rosen « Three Strands of Conservatism on The U.S. Supreme Court : Lessons for Health Care, Gay Marriage, and Constitutional Review in Europe », Jus Politicum, n°6 [https://juspoliticum.com/articles/three-strands-of-conservatism-on-the-u.s.-supreme-court-:-lessons-for-health-care-gay-marriage-and-constitutional-review-in-europe-358]