Cinquante ans d’évolution constitutionnelle en France: les amendements de 2008 et au-delà
La Constitution de la Ve République, entrée en vigueur en 1958, s’est avérée remarquable pour sa capacité d’adaptation aux conditions et aux valeurs politiques, sociales, économiques et démographiques changeantes du pays. Cette capacité marque une profonde rupture dans l’histoire française postrévolutionnaire, marquée par une instabilité constitutionnelle durant plus de 175 années, 15 constitutions différentes se succédant pendant cette période. La Constitution de 1958 a évolué grâce aux amendements du texte (adoptés par le Parlement ou par référendum), aux décisions du Conseil constitutionnel et, enfin, à la pratique des institutions gouvernementales. Cette combinaison de mécanismes (politiques, juridiques et la pratique coutumière) a permis de légitimer ces évolutions : la Constitution joue désormais un rôle fondamental dans la promotion et le développement de l’État de droit, mais également dans l’intégration sociale et politique.
Les amendements constitutionnels de juillet 2008 accentuent la « constitutionnalisation » du droit et de la politique en France. Rejetant les appels pour une refonte radicale du système, le Parlement français a adopté une réforme plus prudente. Suivant pour l’essentiel les recommandations d’une commission établie par le Président Sarkozy (la Commission Balladur), le Parlement a amendé la Constitution de manière à encadrer les pouvoirs du président de la République, à rééquilibrer les relations entre le président de la République et le Gouvernement et à mieux protéger les droits des citoyens. Dans certains domaines, les changements restent modestes, comme, par exemple, la définition des pouvoirs du président de la République et de ses relations avec le premier ministre. Dans d‘autres domaines, les changements pourraient être plus significatifs, même si leur importance dépend en grande partie de la capacité et de la volonté des institutions de se servir de leurs nouvelles compétences (par exemple, les relations entre le Parlement et le Gouvernement). Dans d’autres domaines, enfin, les changements sont considérables, comme, par exemple, en permettant aux justiciables, à l’occasion d’un litige devant les juridictions judiciaires ou administratives, de contester, la constitutionnalité d’une loi déjà en vigueur devant le Conseil constitutionnel.
Les développements constitutionnels que la France a connus depuis 1958, fournissent un excellent exemple de l’établissement progressif du constitutionnalisme dans une nation qui a été longtemps hostile au « gouvernement des juges ».