L’application par les cours et les tribunaux de normes juridiques générales aux espèces particulières qui leur sont soumises est souvent décrite dans des termes imprécis qui ne permettent pas d’en différencier les aspects cognitifs et volitifs. La distinction entre interprétation au sens strict et concrétisation organique vise précisément à corriger ce problème. Dans le présent article, la distinction est d’abord développée à un niveau théorique. Elle est ensuite appliquée, dans une perspective plus empirique, à l’analyse des notions au travers desquelles est perçue l’activité des juridictions : la séparation des pouvoirs, la justice constitutionnelle, l’État de droit et la démocratie. La distinction, est-il soutenu, permet de mieux cerner et de mieux comparer les différences et les ressemblances entre le pouvoir judiciaire et les autres branches du pouvoir politique. En outre, elle offre un fondement plus solide que les distinctions traditionnelles pour la construction de théories prescriptives de l’activité décisionnelle des organes juridictionnels.