O. Cayla et J.-L. Halpérin (dir.), Néo ou rétroconstitutionnalismes ? (R)évolution des démocraties constitutionnelles (1989-2015) (2018)
Recension de O. CAYLA et J.-L. HALPÉRIN (dir.), Néo ou rétro constitutionnalismes ? (R)évolution des démocraties constitutionnelles (1989-2015), 6 vol., Paris, Mare & Martin, 2018.
Review of O. CAYLA et J.-L. HALPÉRIN (ed.), Néo ou rétro constitutionnalismes ? (R)évolution des démocraties constitutionnelles (1989-2015), 6 vol., Paris, Mare & Martin, 2018.
N
éo ou rétro-constitutionnalismes ? est un coffret de six ouvrages réunissant les contributions d’environ quatre-vingts auteurs, majoritairement des universitaires, d’horizons théoriques et géographiques très divers. Ce « sommet » des chercheurs et praticiens du droit vise à dresser un bilan critique de l’état du droit constitutionnel contemporain – tant sur le plan empirique que doctrinal – et constitue l’aboutissement d’un projet scientifique, porté par l’Agence nationale de recherche, lancé en décembre 2011. Olivier Cayla et Jean-Louis Halpérin – qui ont dirigé ensemble cette entreprise de recherche – ont constaté l’émergence, à partir des années 1990, d’une pluralité de discours juridiques de la part des institutions et de la doctrine, dont la nouveauté pourrait s’interpréter comme un dépassement du constitutionnalisme moderne par l’avènement de formes plurielles de « néo-constitutionnalismes ». Le titre du coffret pose une alternative entre deux préfixes « néo » ou « rétro » pour habiller le « constitutionnalisme » qui, seul, ne permet plus de comprendre les phénomènes contemporains. Les faits majeurs de la période 1989–2015 sont, pour les directeurs de cette œuvre collective, « difficilement solubles dans le constitutionnalisme classique » (vol. 1, p. 17). Le constitutionnalisme, cette « doctrine juridico-politique tout à fait propre à la culture occidentale » a déjà connu deux grands moments successifs « en essentielle tension l’un avec l’autre » (p. 13). Le premier moment, qualifié de « moment franco-américain », est daté de la fin du xviiie siècle et correspond à une « phase pionnière » dans laquelle l’État est soumis à la constitution et au respect des droits de l’Homme. Le deuxième moment, ici nommé « moment germanique », est présenté comme celui de la consécration de l’État de droit, tout au long du xxe siècle, avec l’émergence de la figure tutélaire du juge constitutionnel chargé de soumettre les organes de l’État au respect des droits fondamentaux – au premier rang desquels le principe de dignité humaine. Ce « deuxième âge » constituerait une « transformation profonde du concept de constitution » (p. 16), qui acquiert alors véritablement le statut de norme juridique.
Filant le cours de l’histoire, Olivier Cayla et Jean-Louis Halpérin identifient une série de phénomènes constitutionnels nouveaux, à partir de 1989, et tentent d’en saisir le caractère « révolutionnaire », tant ils ne semblent pouvoir être subsumés sous les deux premiers âges du constitutionnalisme. Ils se demandent « si, derrière [l’]impression de “tournant” dans la période du passage du xxe au xxie siècle, il [est] avisé d’y discerner l’avènement d’un éventuel néo-constitutionnalisme, voire d’une pluralité de néo-constitutionnalismes » (p. 20). Chacun des six volumes constitue une voie d’exploration de cette problématique générale. Une large place est ainsi faite à l’étude des États non occidentaux qui sont, à la fin du xixe siècle, entrés chacun à leur manière dans des processus constituants. Pour Patrick Charlot, les Printemps arabes de 2011, d’une part, et l’adoption par de nombreux États africains d’une constitution, d’autre part, ont apporté empiriquement « un nouveau souffle à [la] dynamique constitutionnelle », et conceptuellement une « nouvelle manière de penser » le constitutionnalisme (vol. 5, p. 14). Un tel phénomène interroge : l’appropriation par ces États des principes inhérents au constitutionnalisme moderne a-t-il abouti à l’émergence d’un néo-constitutionnalisme, voire d’une pluralité de néo-constitutionnalismes ? C’est l’une des déclinaisons du sujet envisagée dans le cinquième volume.
Cela étant, au sein même du « berceau du constitutionnalisme », en Occident, il convient de se demander si les États sont toujours liés par les principes du constitutionnalisme classique des deux premiers âges constitutionnels auxquels ils ont donné naissance. Le quatrième volume envisage cette question en retraçant l’évolution de l’office du juge constitutionnel qui pourrait bien avoir changé dans sa substance le modèle classique. C’est dans un volume distinct (vol. 3) que le cas de la France – tardivement ralliée d’après Olivier Cayla au « modèle germanique » – est analysé. Enfin, deux volumes se distinguent en ce qu’ils abordent la problématique sous un angle plus thématique et global. Tel est le cas du dernier volume relatif aux questions bioéthiques et environnementales, élevées à un rang constitutionnel, et qui sont la manifestation pour Olivier Cayla d’une mutation dans les fondements anthropologiques du constitutionnalisme classique. C’est également le cas du deuxième volume, sans doute le plus conceptuel, mais dont la thématique abordée (« Démocratie et constitutionnalisme ») n’est pas clairement reliée à la problématique générale du projet de recherche. Il semblerait néanmoins que cet ouvrage soit une réponse apportée au problème, soulevé dans l’avant-propos, des tensions inhérentes aux deux premiers âges constitutionnels qui renferment des principes contradictoires aboutissant à des tensions entre « État de droit et démocratie ». Cette tension aurait-elle été dépassée dans un « troisième âge » constitutionnel, sorte d’Aufhebung des deux premiers moments ? Ainsi pourrait être posée la question soulevée par le second volume.
À ce stade de la présentation de l’ouvrage, le lecteur pourrait être étonné à différents égards. Il pourrait d’abord se demander ce qu’il est advenu du « rétro-constitutionnalisme ». Si le titre du coffret dresse bien une alternative entre « néo » et « rétro » constitutionnalismes, il n’est question jusqu’à présent que de néo-constitutionnalisme. Le fait est que la problématique – tout comme la présentation de l’entreprise scientifique – consacre une faible part à ce néologisme qu’est le rétro-constitutionnalisme. Seule une poignée d’auteurs fait usage de cette expression. Parmi eux, Jean-Louis Halpérin et Éric Millard (vol. 1), dans leur lecture critique du néo-constitutionnalisme, ont préféré re-qualifier certaines doctrines ou certains faits de « rétro-constitutionnalistes ». Jean-Louis Halpérin désigne ainsi un écueil de la doctrine qui, sous couvert d’établir des continuités historiques, s’égarerait dans une rétrocession erronée des faits. Éric Millard qualifie, quant à lui, de « rétro-constitutionnaliste » le système constitutionnel sud-américain en ce qu’il prétend avoir dépassé les concepts constitutionnels classiques lors même qu’il ne fait qu’opérer un retour à un système pré-moderne de constitutionnalisme. Le terme ne renvoie par conséquent à aucun concept précis. Le préfixe doit être entendu littéralement comme un « retour en arrière » et le sens de l’expression dépend de l’usage qu’en fait l’auteur. La même souplesse prévaut à l’égard du terme « néo-constitutionnalisme » qui est parfois utilisé pour désigner une tendance du discours de la doctrine juridique ou pour qualifier une réalité empirique. Dans l’avant-propos, il est ainsi précisé que « néo-constitutionnalisme » doit s’entendre littéralement comme « quid novi ? ».
Par conséquent, le lecteur ne doit pas s’attendre à une analyse du courant de pensée qui « a mis la main » sur l’étiquette du « néoconstitutionnalisme » et qui rassemble des auteurs comme Dworkin, Habermas ou encore Ferrajoli (p. 20). Au contraire, les auteurs précisent d’emblée qu’ils s’écartent de ce mouvement qui, dans une approche post-positiviste, pense l’avènement d’un nouveau constitutionnalisme fondé sur un retour aux valeurs. En définitive, la plasticité choisie dans la définition du cadre d’analyse et dans le choix d’une méthode pluraliste implique une grande hétérogénéité des contributions, qui ne prennent pas toutes le soin de rappeler en quoi elles s’insèrent dans la thématique générale de l’ouvrage. Le lecteur ne trouvera pas une réponse claire et univoque aux grandes questions posées dans l’avant-propos. Au contraire, il obtiendra autant de réponses que de contributions et d’États qu’elles envisagent. Cela dit, chaque volume renferme de remarquables contributions, qui sont soit des études de cas originales par la nouveauté de leur regard sur un objet connu ou inédit, soit des critiques incisives de l’état du droit constitutionnel. Le coffret est à cet égard parfaitement à l’image du « troisième âge constitutionnel » : l’âge de l’« éclatement » du constitutionnalisme en une myriade de constitutionnalismes qui n’a plus rien d’« universel et uniforme » (p. 22).
Cette recension ne pourra, au regard de la taille du coffret, évoquer l’ensemble des thèses présentées au sein des différents volumes. Elle se limitera à reprendra quelques-unes des grandes lignes argumentatives développées en réponse à la problématique générale.
I. Le contrôle de constitutionnalité au carrefour des différents « âges constitutionnels »
L’émergence du contrôle de constitutionnalité est-elle à l’origine d’une mutation constitutionnelle caractéristique d’un nouvel âge du constitutionnalisme ? Que dire de son évolution : s’analyse-t-elle comme l’éclosion ou au contraire comme la négation des principes ayant présidé à sa naissance ?
A. Repenser l’histoire de la justice constitutionnelle
Dans une analyse remarquable par l’étendue de ses références doctrinales et historiques, Jean-Louis Halpérin propose une lecture originale des effets de l’introduction de la justice constitutionnelle au sein de différents ordres juridiques. Critique envers le rétro-constitutionnalisme – discours qui s’emploie à construire une histoire idéalisée et continue du judicial review, dont l’évolution est perçue comme un progrès linéaire –, il interroge les lieux communs du discours conventionnel. Il se demande, d’une part, si Marbury v. Madison s’analyse véritablement comme le point de départ du judicial review aux États-Unis et si, d’autre part, la création du Conseil constitutionnel en 1958 marque bien l’origine du contrôle de constitutionnalité en France.
S’inspirant des études récemment menées aux États-Unis sur l’impact de la décision Marbury v. Madison, Jean-Louis Halpérin conclut que le judicial review était déjà « bien admis à l’époque de Marbury, même s’il y avait des discussions sur son étendue » (vol. 1, p. 120). À l’appui de nombreux exemples, il montre en quoi la période 1780-1800 forme déjà le terrain d’une première éclosion du judicial review – éclosion logiquement « lié[e] à l’avènement d’une constitution écrite qu’il s’agit d’interpréter ». La décision Marbury v. Madison demeure néanmoins tout à fait décisive en ce que la Cour suprême a bien été « la première juridiction au monde à tirer toutes les conséquences de l’écriture d’une constitution, avec une clause de suprématie, c’est-à-dire une forme (encore vague et à préciser) de hiérarchie des normes » (p. 124). Elle marque le point de départ d’une phase d’acculturation du pays à cette nouvelle technique, qui, pour l’auteur, deviendra réellement révolutionnaire au xxe siècle avec l’opposabilité du Bill of rights aux États fédérés (p. 126).
Concernant la France, Jean-Louis Halpérin retrace le fil des arrêts les plus remarquables de la Cour de cassation, qui, depuis la Révolution française, s’est à plusieurs reprises penchée sur ce qui relève d’un contrôle de conformité des lois ou des normes d’un rang inférieur au texte constitutionnel. Si elle a considéré que ce rôle ne lui appartenait pas – en tout cas s’agissant des lois (Crim. 11 mai 1833, affaire « Paulin ») –, il reste que « la constitution est bien reconnue, en dépit des changements fréquents de régime, comme la première des lois ». Jean-Louis Halpérin place donc bien l’origine de la justice constitutionnelle dans la création du Conseil constitutionnel en 1958, mais il réfute l’opinion générale selon laquelle cette naissance tardive résulterait du légicentrisme français ou du défaut de caractère normatif de la constitution. Celle-ci est au contraire considérée, dès la Révolution française, comme une norme supérieure aux lois. « L’absence d’introduction du contrôle de constitutionnalité des lois en France avant 1958 a été un choix politique des juges » (p. 145). En définitive, pour Jean-Louis Halpérin, la question du contrôle de constitutionnalité des lois se pose déjà au xviii siècle, sous l’empire du « premier âge » constitutionnel, en France comme aux États-Unis. Son « acculturation » commence sous le « deuxième âge » constitutionnel, dans la plupart des cas au xxe siècle. Et, dans quelques États comme les États-Unis, l’Allemagne ou l’Inde, la « nouvelle configuration de l’ensemble du champ juridique » que les évolutions de la justice constitutionnelle des deux dernières décennies ont entraînée relève d’un « troisième âge constitutionnel » (p. 168). Nous regrettons toutefois que l’analyse s’achève sur « les effets de grande ampleur » produits par ce dernier stade sans que ceux-ci soient davantage explicités dans la contribution. Le propos de Jean-Louis Halpérin trouve néanmoins une forme de prolongement dans celui d’Olivier Cayla en ce qui concerne la France, car celui-ci retrace l’évolution de la justice constitutionnelle française depuis 1958.
Olivier Cayla identifie en effet deux moments-clés, deux décisions du Conseil constitutionnel – « Liberté d’association » (1971) et « Loi bioéthique » (1994) – manifestant l’entrée de la France dans le « modèle germanique ». Il pense le passage du premier au « deuxième âge » constitutionnel comme une inflexion du sens donné à la constitution, qui n’est plus synonyme de pouvoir constituant d’une nation souveraine, mais évoque bien plutôt la transcendance du principe de dignité humaine. Le Conseil constitutionnel est le principal responsable de cette mutation en ce qu’il a, par sa décision de 1971, conféré aux droits de l’Homme le sens de droits fondamentaux illimités et, par sa décision de 1994, dégagé le principe cardinal de la dignité humaine (vol. 1, p. 30). L’auteur est ici très critique envers cette évolution qu’il rattache à une forme d’anti-constitutionnalisme. Il rappelle la différence essentielle entre un ordre fondé sur la vision classique des droits de l’Homme et un ordre fondé sur les droits fondamentaux au centre desquels réside la dignité humaine. Cette différence est pour lui d’ordre anthropologique, car si dans le premier cas l’Homme est perçu comme doué d’une volonté libre ; dans le second cas, il est un fait biologique qui ne s’appartient pas. Il appartient à la nature qui le transcende et, dès lors, ce n’est pas sa volonté qui gouverne, c’est l’ordre public naturel toujours déjà là qui le contraint à se respecter lui-même. Une telle remise en cause de la puissance de la volonté de l’homme subvertit, d’après l’auteur, les fondements du droit public moderne (p. 47). Elle aboutit à une jurisprudence illibérale où le juge intervient dans le rapport que l’individu entretient avec lui-même. Le juge impose à l’individu de respecter sa dignité tout en s’en érigeant comme le seul authentique interprète. Deux exemples sont alors mentionnés : la jurisprudence notoire du Conseil d’État de 1995 dite « Commune de Morsang-sur-Orge » et la décision du Conseil constitutionnel de 2010 dite « Loi anti-burqa ». Le fait que le juge s’immisce, au nom de la dignité humaine, dans les relations intra-personnelles de tout un chacun est l’ultime manifestation du gouvernement des juges propre au « deuxième âge » constitutionnel.
La position d’Olivier Cayla est vivement contestée dans le troisième volume, dès la préface, par Dominique Rousseau, qui estime que penser l’histoire du constitutionnalisme comme étant celle de deux âges qui se succèdent est une reconstruction historique fantasmée des juristes, car, dit-il, « il faut avoir le regard un peu brouillé pour affirmer que le constitutionnalisme du xixe siècle est celui de la philosophie politique et des droits de l’Homme et que le constitutionnalisme de la seconde moitié du xxe siècle celui de la philosophie du droit et de la dignité humaine ; que le premier est gouvernement démocratique du peuple et que le second est gouvernement des juges par le droit » (vol. 3, p. 14). Dominique Rousseau plaide pour l’idée selon laquelle le constitutionnalisme moderne a porté des principes qui n’ont pas connu une concrétisation immédiate ; l’histoire étant plutôt celle de leur déploiement progressif.
La lecture linéaire et progressiste que fait Dominique Rousseau de l’histoire constitutionnelle s’oppose ainsi nécessairement à celle d’Olivier Cayla qui décèle dans le conflit contemporain entre justice constitutionnelle et démocratie un affrontement entre les principes inhérents aux deux premiers âges constitutionnels.
B. Repenser la démocratie face au juge constitutionnel
Pour Véronique Champeil-Desplats et Jean-Marie Denquin, il est évident que le sens de la démocratie a connu un véritablement changement avec le développement du contrôle de constitutionnalité (vol. 2, p. 22). S’intéressant aux différentes définitions qu’a pu revêtir la notion de « démocratie » au fil du temps – faute d’en saisir l’essence –, ils constatent qu’aujourd’hui la démocratie est associée « au respect des droits fondamentaux ». Celui qui est chargé de les garantir, le juge constitutionnel, occupe dès lors une place de premier plan. L’association entre démocratie et justice constitutionnelle soulève néanmoins un certain nombre de questions que l’admirable contribution de Pierre Brunet « To have and have not : de la difficulté contre-majoritaire et des moyens d’en sortir » se propose de présenter. Pierre Brunet indique que si Tocqueville s’inquiétait de la tyrannie de la majorité – auquel le judicial review apportait d’après lui un remède –, Bickel a plus tard plaidé contre la tyrannie de la minorité des juges de la Cour suprême en mesure de s’opposer à la majorité de la représentation politique – ce qui est fondamentalement anti-démocratique (vol. 2, p. 194). La pensée de Bickel a fait naître aux États-Unis un courant de pensée : le popular constitutionalism, qui préconise la résolution ultime de toute question constitutionnelle majeure directement par le peuple. Aux antipodes de ce courant se trouve justement les auteurs du courant « néo-constitutionnaliste », dont Habermas, qui estime que le contrôle de constitutionnalité est une condition même de la démocratie, dans la mesure où la constitution a pour projet la réalisation de celle-ci. Éric Millard condamne fermement cette position, dans la contribution au titre pour le moins éloquent : « Quelques bonnes raisons de douter du néo-constitutionnalisme ». Pour lui, les tenants du néo-constitutionnalisme ne croient pas « en la constitution comme un texte politico-juridique susceptible de garantir le libéralisme et la démocratie », ils font « seulement confiance aux juges constitutionnels pour protéger les individus eux-mêmes ». Cela relèverait non pas de l’accomplissement de la démocratie, mais de la consécration d’une juristocratie, d’un gouvernement des juges. Les cours constitutionnelles sont effectivement, affirme Pascal Pasquino, au même titre que les organes délibérants, productrices internes des normes de droit : les cours constitutionnelles « représentent le check ou contrepouvoir le plus important à l’égard de la majorité des élus ». Mais est-ce pour autant contraire à la démocratie ? Il y a à cette question autant de réponses qu’il y a d’auteurs et de définitions proposées de la démocratie.
Cela dit, un tel pouvoir des juges présente-t-il un caractère novateur qui justifierait de parler de néo-constitutionnalisme ? En Europe en tout cas, ce phénomène semble tout à fait inédit. Comme l’explique Eleonora Bottini, même le grand théoricien du droit Hans Kelsen – dont la pensée est à l’origine du développement du contrôle de constitutionnalité en Europe – n’a jamais imaginé faire du juge constitutionnel un co-législateur. Eleonora Bottini indique ainsi qu’il y a, au moins en Allemagne, et de manière latente en Europe, un « renversement total de la logique kelsénienne, puisque la légitimité de la justice constitutionnelle n’est pas fondée sur l’expertise juridique, mais bien au contraire sur la mise en œuvre d’une Politique au sens noble du terme, la réalisation sur terre de l’idée platonicienne des droits fondamentaux » (vol. 4, p. 155). Pour établir ce constat, Eleonora Bottini s’appuie sur les conclusions d’Antoine Basset, qui, dans une très éclairante présentation des fondements de la justice constitutionnelle allemande, montre que, contrairement à l’idée reçue, Schmitt n’a pas complètement perdu la partie dans sa controverse avec Kelsen. En effet, si c’est bien le juge constitutionnel qui est le gardien authentique de la Constitution allemande, il en garantit non pas seulement le respect des procédures formelles mais tout autant, voire davantage, l’ordre des valeurs qu’elle définit. Le juge constitutionnel est donc l’interprète ultime de ces valeurs suprêmes qui orientent le système juridique tout entier et juge à partir d’elles la validité des normes inférieures. La justice constitutionnelle allemande s’appuie indéniablement sur une conception matérielle de la constitution (p. 179).
Dès lors, si le modèle germanique a étendu le rôle du juge constitutionnel, la France – qui d’après Olivier Cayla s’est ralliée à ce modèle dès 1971 – connaît-elle aussi ce gouvernement des juges ? La QPC a-t-elle contribué à installer le système juridique français dans le « deuxième âge constitutionnel » ou l’a-t-elle fait basculer dans un « troisième âge » ?
C. Repenser la constitution avec la QPC
Au sein du troisième volume, deux contributions relatives aux effets de l’introduction de la QPC tant sur l’ordre juridique que sur la pensée constitutionnelle en France se démarquent par leur rivalité. Si, pour Dominique Rousseau, l’arrivée de la QPC s’accompagne d’une « redécouverte de la pensée constitutionnelle », pour Armel Le Divellec, elle est bien plutôt le signe de son « déclin ». Dans une audacieuse dénonciation, ce dernier déplore le fait que les constitutionnalistes – déjà dépourvus d’intérêt pour les questions d’ordre théorique soulevées par leur matière – se sont semble-t-il définitivement engouffrés avec la QPC dans des considérations techniques. Nettement plus optimiste, Dominique Rousseau considère au contraire que la QPC a constitué une véritable fenêtre ouverte, permettant à la doctrine de sortir de « la pauvreté d’une réflexion constitutionnelle tournée sur elle-même et toujours sur les mêmes sujets » (vol. 4, p. 126). Dominique Rousseau estime par conséquent que la mise en place de la QPC offre une bonne occasion de repenser la constitution. Pour Armel Le Divellec, au contraire, si les chercheurs entendent repenser leur objet à l’aune de la jurisprudence constitutionnelle, les carences de la discipline ne sont pas près de trouver leur palliatif, car ce n’est pas le juge constitutionnel qui fournira à la place de la doctrine une théorie de la constitution.
Mais peut-on dire au moins que la QPC a renouvelé le système constitutionnel français ? Les réponses des deux auteurs sont ici encore aux antipodes. Pour Dominique Rousseau, la QPC est un indéniable progrès démocratique, car, grâce à elle, la constitution est enfin perçue comme « le point nodal de la société, le texte par où la société communique avec elle-même ». L’accès au prétoire du juge constitutionnel conféré par la QPC à tout justiciable s’inscrit donc, d’après l’auteur, dans un processus de « démocratie continue », car contrairement au « citoyen électeur [qui] met en scène la figure abstraite de la Nation ou du Peuple, […] le citoyen justiciable met en exercice la figure concrète du petit peuple, des gens, de “tout un chacun” ». Armel Le Divellec propose une lecture nettement plus pragmatique considérant que la QPC n’a en rien favorisé l’appropriation par le peuple de la constitution, car, écrit-il, comment « ne pas voir que les justiciables ont des visées exclusivement prosaïques et les conserveront ? Ils veulent simplement gagner leur procès, quels que soient les moyens ». La QPC ne ferait ainsi que renforcer une approche instrumentale et individualiste de la constitution.
II. La nouveauté relative des « modèles » constitutionnels
Le cinquième volume, dirigé par Patrick Charlot et Claude Klein, concerne les émergences de nouveaux modèles de démocratie constitutionnelle pouvant être observées en Afrique et au Proche-Orient. Retraçant les récents événements qui ont traversé ces aires géographiques, l’ouvrage se propose de questionner la notion de « néo-constitutionnalisme » au travers notamment de l’écriture de nouvelles constitutions. C’est par une quadruple influence, de la plus locale à la plus « occidentalisée » pourrait-on dire, que peuvent se comprendre ces nouveaux modèles de démocratie constitutionnelle – modèles tirés de l’étude comparative des différents droits positifs à l’honneur, considérés comme de véritables laboratoires du droit constitutionnel.
A. Une influence endogène : la reconnaissance doctrinale d’un mouvement constitutionnel inédit
L’influence de la société et du droit propre à chacun de ces pays permet de comprendre la part la plus nationale de ces nouvelles constitutions : par exemple, la fin du régime d’Apartheid en Afrique du Sud ou la pratique des conférences nationales dont le Bénin est le pionnier sur le continent africain. Parmi ces influences locales, la part belle est donnée dans la première partie de ce volume aux révolutions. À cet égard, Patrick Charlot affirme dans la préface du volume que la révolution peut être enfantée par les pouvoirs politiques ou juridiques eux-mêmes, preuve en est l’exemple israélien clairement développé par Claude Klein : en deux lois fondamentales de 1992 de la Knesset et une décision de la Cour suprême israélienne de 1995, les fondements même du système de gouvernement israélien furent rénovés. Dans ces révolutions juridiques, le contrôle de constitutionnalité a donc entièrement sa place.
Il convient à ce titre de s’arrêter quelques instants pour suivre la conceptualisation juridique de la révolution, magistralement opérée par Otto Pfersmann. Après avoir tracé la généalogie du terme et la rupture conceptuelle opérée par la Révolution française, il rappelle brièvement la dualité des sphères du fait et du droit et la récursivité de cette dernière, prévoyant sa propre modification par son système de normes. Continuité (évolution) et discontinuité (révolution) sont ainsi clairement établies par le droit-même. Par une réélaboration critique de la théorie de Hans Kelsen, il définit la révolution juridique comme :
a) la production d’un acte à visée normative, b) modifiant les règles suprêmes de production de règles, c) n’ayant pas été produit selon les règles de production de règles pertinentes, d) globalement efficace et se substituant aux normes de production de normes jusque-là en vigueur et enfin e) considéré comme ayant le statut normatif visé par son contenu (vol. 5, p. 36).
Il est évident par exemple que, en 1971–1974, le Conseil constitutionnel n’a eu aucune habilitation normative lui permettant d’ériger par ses propres moyens le préambule de la Constitution de 1958 au rang de norme constitutionnelle. Il faudrait alors considérer principalement deux positions : l’une conservatrice, l’autre légitimatrice. La première consiste à estimer que la décision est fondamentalement contraire au droit bien qu’elle ait eu lieu. La seconde opinion consiste à estimer que s’est opérée une révolution juridique. La norme fondamentale de l’ordre juridique n’a pas changé en elle-même, mais elle a laissé place à une autre norme fondamentale afin d’admettre comme « constitution » le désormais « bloc de constitutionnalité » et de faire rétrospectivement de la décision « Liberté d’association » une décision véritablement constitutionnelle. La validité de l’une ou l’autre de ces deux positions suppose avant tout un choix épistémologique individuel, qui, s’il est majoritaire et globalement suivi, deviendra la position objective du droit, entérinant ou rejetant l’existence de la révolution juridique. La mise à l’épreuve d’une telle présentation pourra être ainsi faite par le lecteur au gré des contributions sur les événements politiques des Printemps arabes notamment.
B. Des influences exogènes : vers un modèle constitutionnel universel ?
La deuxième influence sur les nouveaux modèles de démocratie constitutionnelle réside dans le droit international. Comme le rappelle fort justement Hélène Tourard, « la question des rapports entre droit international et droit interne et la reconnaissance constitutionnelle de droits de l’Homme » (p. 142) sont les deux piliers d’une harmonie que l’internationalisation des constitutions permettrait de construire. Formellement, le droit international modèle l’écriture des constitutions, notamment au travers de certains accords internationaux ; matériellement, les constitutions se conforment au nouveau principe de légitimité démocratique des États voulu plus ou moins directement par le droit international. Encore une fois, la dialectique entre droit constitutionnel et droit international – particulièrement effective en Afrique – pourra être constatée au prisme de l’analyse du droit positif de trois pays maghrébins : l’Algérie, le Maroc et la Tunisie.
La troisième influence est celle du constitutionnalisme libéral classique. Ainsi, le troisième chapitre se propose de retracer l’importance du processus de rédaction de nouvelles constitutions dans différents pays d’Afrique, mais aussi de leur pratique effective. À ce titre, tous les auteurs, et notamment Albert Bourgi, estiment que si le constitutionnalisme a depuis peu fait irruption dans le débat politique démocratique africain, il s’avère désormais que les constitutions ne sont plus ces vulgaires « chiffons de papier » (p. 340), au mieux inopérants, sinon taillés sur mesure pour un pouvoir présidentiel affirmé, conforté par une justice constitutionnelle prise entre ses griffes.
La quatrième et dernière influence est celle d’un néo-constitutionnalisme occidental faisant place à la dignité humaine, dont il a été tracé quelques traits en introduction. Si cette idée se retrouve en partie dans le droit international, elle apparaît importée des développements récents du droit constitutionnel en ce domaine dans les pays occidentaux. Ainsi, comme le relève à ce propos Joël Mekhantar dans sa contribution intitulée « Le constitutionnalisme africain : des révolutions à l’universalisme de la dignité humaine », « si la “Liberté”, la “Démocratie”, et dans une moindre mesure la “Paix” sont des valeurs classiques d’un modèle constitutionnel universel qui s’est largement répandu […] le principe de “Dignité” s’impose désormais comme une nouvelle valeur sûre du néo-constitutionnalisme » (p. 337).
Pourtant, si les États qui se sont récemment dotés d’une constitution (en Afrique notamment) ont renouvelé le sens du constitutionnalisme moderne principalement parce que ces États constituent, au mieux des modèles, sinon des illustrations d’un type de constitutionnalisme tout à fait unique qui intègre des réalités politiques et culturelles locales et internationales, cela n’empêche pas qu’il y ait un mouvement uniforme et planétaire de constitutionnalisation. À l’instar de ce qu’a pu écrire Éric Millard s’agissant de l’Amérique du Sud (vol. 1), les « nouveaux modèles » de démocratie constitutionnelle ne sont en réalité que des illustrations de régimes hybrides qui ont, eux, pour modèle, le constitutionnalisme libéral (idée d’une constitution écrite, souveraineté du peuple ou de la nation, séparation des pouvoirs, droits de l’Homme, État de droit et, désormais, hiérarchie des normes et justice constitutionnelle). Peu importe donc l’approche que l’on se fait du « néo-constitutionnalisme », ce dernier ne fait pas, selon la formule de Joël Mekhantar, « table rase du constitutionnalisme classique » (p. 334).
III. La nouveauté affirmée des « objets » constitutionnels
Le sixième et dernier volume, dirigé par Xavier Bioy, a trait aux nouveaux objets constitutionnels que sont la bioéthique et l’environnement, c’est-à-dire, pour reprendre la notion phare de ses développements, le « vivant », dont les obstacles liés à sa reconnaissance constitutionnelle proviennent en partie du bouleversement conceptuel qu’elle impliquerait.
A. La difficile consécration constitutionnelle du « vivant »
De manière consensuelle chez les contributeurs, est visé par « vivant », « l’ensemble des organismes vivants, de leurs éléments et produits, humanité comprise, et plus encore les interactions qui donnent sa fonctionnalité au système » (vol. 6, p. 21). Or, selon l’observation très éclairante de Marie-Angèle Hermitte, ce concept ne serait pas encore saisi par l’ordre juridique dans son entièreté : il fait jusqu’à présent l’objet d’une scission irréductible entre le « vivant humain » et le « vivant non humain ». Si les deux sphères se développent de manière asymétrique, la notion de « vivant » souhaite les lier indissolublement dans un système sans clôture interne. Le constat amer de l’absence de norme substantielle visant directement cet objet est partagé par les différents auteurs. Toujours est-il que le « vivant » a acquis le statut de « concept politique mobilisateur » (p. 22) grâce à un fondement et un destin communs entre l’Homme et la nature. Le fondement commun est le code génétique, pont fragile entre le vivant humain et le vivant non humain, et qui appuie la « foncière unité du monde vivant » (O. Cayla, vol. 1, p. 35) ; le destin commun, lui, est donné par la théorie de l’évolution et, pourrait-on ajouter, par les avertissements scientifiques liés au destin de la Terre.
Face à ces enjeux, le droit positif, et ce qu’en font les juges, ne semblent guère satisfaisant pour les contributeurs. En effet, Marie-Angèle Hermitte constate aux côtés de Pierre Egea l’absence récurrente de constitutionnalisation directe qui implique souvent que le pouvoir de révision constitutionnelle et le Conseil constitutionnel se défaussent sur le législateur. Il existe néanmoins un processus de constitutionnalisation, finement analysé par Pierre Egea, et qui montre que la singularité des décisions du Conseil constitutionnel relatives au vivant est liée à l’oscillation de ce dernier entre une polarité « positive » – l’affirmation d’un grand principe comme celui de dignité humaine – et « négative » – la pratique du self-restraint à l’égard du Parlement inaugurée en 1975 – dont l’interstice entraîne une pléthore d’interprétations possibles. De plus, nombre de ces nouveaux objets restent sans protection satisfaisante de la part du Conseil constitutionnel : embryon, bioéthique, ou empreintes génétiques. Ce long silence consterne quelque peu Bertrand Mathieu, qui fait part dans sa conclusion du peu d’avancement de la matière, qu’il pensait pourtant une vingtaine d’années plus tôt promise à un grand avenir.
Le bilan n’est toutefois pas si désastreux, comme le concède la totalité des auteurs concernés. Le Conseil constitutionnel progresse parfois sur le terrain du vivant. C’est lui qui serait, selon Pierre Egea, le premier acteur de constitutionnalisation du vivant. Pour Marie-Angèle Hermitte, il fait figure d’exemple dans la disposition du corps et dans la biomédecine, voire lorsqu’il relie le vivant non humain au vivant humain pour l’exercice du droit de propriété, l’égalité, la fiscalité environnementale ou la liberté d’entreprendre, bien que les normes reconnues soient surtout procédurales. Joël Andriantsimbazovina montre alors avec clarté et justesse que la question doit se régler au moyen d’imbrications avec le droit international et européen. Xavier Bioy suggère enfin que seule la méthode comparatiste peut véritablement nous éclairer sur la compréhension du vivant par le droit français, ainsi que s’agissant de l’intérêt et de la pertinence de sa constitutionnalisation ; comparaison que permet l’analyse des différents droits positifs relatifs au vivant exposés par des spécialistes dans la seconde partie de l’ouvrage. Bertrand Mathieu conclut le propos par une présentation symboliquement inégalitaire entre trois déconstructions (celle de l’homme, celle du droit et celle des valeurs) et les potentielles reconstructions par le moyen de la science et de l’économie aux fins d’une possible évolution de l’espèce humaine dont les aboutissants seraient encore inconnus.
B. Le constitutionnalisme à l’épreuve du « néo-constitutionnalisme »
Pourrait-on dire que ces nouveaux objets constitutionnels ont engendré un renouveau du constitutionnalisme moderne ? Sans aucun doute pour Olivier Cayla, qui voit là une rupture dans les fondements anthropologiques du constitutionnalisme moderne. La pensée politico-juridique des xviie et xviiie siècles relative à la nature humaine voyait dans le droit naturel, ou « droit de l’Homme », une liberté que l’homme aurait dans l’état de nature de discerner soi-même par son jugement et sa raison ses propres intérêts, et donc de poursuivre sa vie de façon autonome. Cette liberté constitue le postulat de « l’éminence de la dignité humaine » (vol. 1, p. 36) et du vivant humain sur le reste du vivant qui obéit à la causalité et l’instinct. Toutefois, cette liberté se désagrège en société, et c’est le but du contrat social que de permettre à l’Homme d’actualiser sa condition d’Homme en lui rendant, en un certain sens, cette liberté grâce à la création artificielle d’un État et au mouvement du constitutionnalisme libéral. Or, d’une part la constitutionnalisation du « vivant » bouleverse cette scission entre l’Homme et la nature et, d’autre part, la centralité de la dignité humaine en droit constitutionnel opère une substitution du rapport de soi à soi par un rapport de soi à l’humanité, une hétérolimitation au lieu d’une autonomie, au profit d’un « rétro-constitutionnalisme », voire d’un « anti-constitutionnalisme » (p. 55).
Aux critiques puissantes d’Olivier Cayla et d’Armel Le Divellec, il conviendrait d’ajouter que si, d’un point de vue normativiste, faire accéder au rang constitutionnel de telles normes est tout à fait possible, voire souhaitable pour les auteurs de ce dernier volume, le droit constitutionnel fait désormais face à la tendance de sa récupération au profit d’une perspective fonctionnaliste : celle d’une garantie verrouillée et effective de ces nouveaux objets au sommet de la hiérarchie des normes positives. Cependant, une telle adjonction dans le droit constitutionnel ne peut avoir seulement des conséquences formelles. Elle est au contraire triplement significative : d’abord, par la mise en avant de l’aspect exclusivement fonctionnel de la « strate » constitutionnelle ; ensuite, par l’importance croissante conférée aux droits du « vivant » et de la dignité humaine sur les autres droits ; enfin, par l’appauvrissement de la sacralité de la constitution comme organisation suprême et centrale de la société dans l’État. En effet, pour le constitutionnalisme moderne, la constitution n’est pas une simple norme à l’étalon de la dignité humaine de l’individu ou du vivant tout entier, mais elle est le reflet de la constitution et de l’organisation d’une société donnée tout entière. Les droits constitutionnels du vivant renouvellent donc d’une autre façon encore le droit constitutionnel et, en filigrane, le constitutionnalisme.
Annette De Moura & Jérôme De Stefano
Annette De Moura est doctorante en droit public à l’Université Jean Moulin Lyon III
Jérôme De Stefano est doctorant en droit public à l’Université Paris II Panthéon-Assas
Pour citer cet article :
Annette De MouraJérôme De Stefano « O. Cayla et J.-L. Halpérin (dir.), Néo ou rétroconstitutionnalismes ? (R)évolution des démocraties constitutionnelles (1989-2015) (2018) », Jus Politicum, n°24 [https://juspoliticum.com/articles/O-Cayla-et-J-L-Halperin-dir-Neo-ou-retroconstitutionnalismes-R-evolution-des-democraties-constitutionnelles-1989-2015-2018]